À l’écran, des petits blocs rectangulaires de couleurs imbriqués les uns dans les autres. Ça fait des petits escaliers, des formes géométriques, on dirait presque un labyrinthe. Un vrai dédale… C’est un jeu vidéo ? Tetris ? Il faut suivre les blocs rouges ? Les bleus ? En zoomant, on voit comme une ligne de vie dans chaque rectangle, c’est quoi ? Il faut faire onduler le truc en double-cliquant ? Comment savoir… Mais non ! Inutile de chercher, pas de manette, encore moins de PNJ. C’est le Pro Tools de PNL ! Ce n’est pas un jeu, ou plutôt si, le rap jeu. On est dans leur studio, leur laboratoire magique, devant l’iMac Pro gris sidéral à 15K. On aperçoit le titre du projet : AUDD.PTX.
Le mec en sweat à zip Tacchini jaune qui réfléchit au problème, c’est Ademo. Barbe au cordeau, jean AMIRI, les dernières Air Max 720 aux pieds. Pour l’instant, il colorie les « éléments audio », Il aime bien geeker comme ça quand la prod’ est terminée. Une couleur par « catégorie », si on peut dire. La basse, toujours en gris. En mode béton : lourd, solide. Plusieurs pistes pour la batterie donc dégradé, comme chez le barbier, mais vert. Vert tenue de Link, vert billet, vert jungle… Hop, c’est vite fait avec le trackpad. Les pads, il y en a d’ailleurs toute une cargaison sur le morceau. En bleu très clair, vaporeux. Ademo a compté les pistes toute la journée (jusqu’à s’en brûler les ailes, comme dans le morceau Mira ?), on dépasse encore la centaine. C’est joli le résultat, ça fait un peu Mondrian, mais sans le fond blanc. C’est l’undercut qui est à blanc, en général. On passe aux vocals. Il se met parme. Enfin, « fantôme de violet ». N.O.S en rouge, bien sûr, le sang, QLF.
C’est comme un grand échiquier virtuel qui se reflète dans les lunettes miroir, les mêmes que celles de la couverture de Fader. La disposition impeccable a l’harmonieux équilibre d’une constellation, un grand ensemble énigmatique et brillant en marbre d’étoiles. Les pièces du jeu commencent à interpréter, dans une avant-dernière répétition, le rêve du compositeur. Allez, play, en appuyant sur la touche espace. Les enceintes de mastering pulsent comme des battements de coeur. Ademo a mis la piste AD COUPLET 1 en SOLO, de sorte à ce que tout le reste de la musique soit « muté ». Beaucoup d’anglicismes avec les logiciels de M.A.O. (et de sigles aussi, apparemment) ce qui signifie qu’on isole une piste pour l’écouter seule.
« Bats les couilles d’l’Himalaya ! »
Cheveux attachés, N.O.S est affalé sur le canapé en cuir, pas loin de son bro. Sous le hoodie Nike gris, il porte le t-shirt Monogram Vuitton du clip d’À l’ammoniaque.
— Fais voir le refrain ?
Le mec en sweat à zip Tacchini jaune qui réfléchit au problème, c’est Ademo. Barbe au cordeau, jean AMIRI, les dernières Air Max 720 aux pieds. Pour l’instant, il colorie les « éléments audio », Il aime bien geeker comme ça quand la prod’ est terminée. Une couleur par « catégorie », si on peut dire. La basse, toujours en gris. En mode béton : lourd, solide. Plusieurs pistes pour la batterie donc dégradé, comme chez le barbier, mais vert. Vert tenue de Link, vert billet, vert jungle… Hop, c’est vite fait avec le trackpad. Les pads, il y en a d’ailleurs toute une cargaison sur le morceau. En bleu très clair, vaporeux. Ademo a compté les pistes toute la journée (jusqu’à s’en brûler les ailes, comme dans le morceau Mira ?), on dépasse encore la centaine. C’est joli le résultat, ça fait un peu Mondrian, mais sans le fond blanc. C’est l’undercut qui est à blanc, en général. On passe aux vocals. Il se met parme. Enfin, « fantôme de violet ». N.O.S en rouge, bien sûr, le sang, QLF.
C’est comme un grand échiquier virtuel qui se reflète dans les lunettes miroir, les mêmes que celles de la couverture de Fader. La disposition impeccable a l’harmonieux équilibre d’une constellation, un grand ensemble énigmatique et brillant en marbre d’étoiles. Les pièces du jeu commencent à interpréter, dans une avant-dernière répétition, le rêve du compositeur. Allez, play, en appuyant sur la touche espace. Les enceintes de mastering pulsent comme des battements de coeur. Ademo a mis la piste AD COUPLET 1 en SOLO, de sorte à ce que tout le reste de la musique soit « muté ». Beaucoup d’anglicismes avec les logiciels de M.A.O. (et de sigles aussi, apparemment) ce qui signifie qu’on isole une piste pour l’écouter seule.
« Bats les couilles d’l’Himalaya ! »
Cheveux attachés, N.O.S est affalé sur le canapé en cuir, pas loin de son bro. Sous le hoodie Nike gris, il porte le t-shirt Monogram Vuitton du clip d’À l’ammoniaque.
— Fais voir le refrain ?

Là, ils écoutent en faisant le truc de rire alors que c’est de la musique, et non un sketch. Réaction un peu bizarre pour le reste du monde, on le fait aussi avec David. Truc de frères… Le résultat est tellement sale que ça en devient comique. Avec ça, ils peuvent bien rouler des mécaniques sur les trottoirs des Tarterêts en lent mystère majestueux car « ça », c’est Au DD, le premier single officiel tiré du nouvel album de PNL : Deux Frères.
Alors « au DD », ça veut dire quoi ? Au détail, bien sûr, la vente de drogue, etc. Mais aussi, au deuxième degré ? À la première écoute, quand je me suis vraiment penché sur le phénomène, c’est l’effet que ça m’a fait. Je me plaisais à faire semblant de croire que je regardais (oui, aujourd’hui, la musique se regarde sur YouTube) une parodie de groupe de rap. Il ne pouvait s’agir que d’une parodie de groupe de rap. Les Inconnus l’avaient bien fait version hard rock en créant les alter egos toulousains des Guns N’ Roses : Dousseur de vivre ; seulement, il y avait un monde entre le génial Axl Rose et Didier Bourdon… mais ça, les humoristes stars des années 80, désormais plus que ringards, ne l’expliquaient pas. PNL, c’est ça, en équilibre sur le fil tendu entre le grotesque et le sublime, entre le « four » de la cité et la tour Eiffel (où ils ont tourné leur dernier clip), en funambule. N.O.S qui fait des fucks face caméra sur une plage en Afrique du sud avant de partir en radeau pendant qu’Ademo chantonne « Je t’aime à la folie », il fallait oser ! Et puis ça n’a rien à voir avec les fucks de Kalash Criminel qui fait croire qu’il va sortir le 47AK s’il y a embrouille… Arrête, tu vas rien sortir du tout à part un refrain trap piqué à Migos. Chez PNL, c’est aussi un fuck au « système ». Ils ne jouent même pas aux rebelles et pourtant ils le sont beaucoup plus que n’importe quel rappeur signé sur une major. Eux « font du biff » en indépendant : « J’sors des mots de merde / Et tu m’payes, payes, payes, payes, payes ». Double ironie… Mieux encore, ils font semblant d’être là par accident : « J’connais pas ré mi sol, la zik j’m’en bats les couilles ». Eux, c’est plutôt : « Rivaldo, Denilson, 91, Essonne ». Peut-on les blâmer quand on se rappelle des « gri-gris » du milieu gauche du Bétis au milieu des années 2000 ? C’est sûr qu’en comparaison, la zik, c’est sympa, mais bon…
Tu parles ! Ce sont des scientifiques, comme disent Amin et Hugo. Les frères ont écouté Drake, trouvé ça cool mais se sont dit : « C’est pas assez pop en fait… » Alors en avant pour une flopée de mélodies hypnotiques et autres trouvailles géniales : le couplet de Naha, les premières mesures de celui d’Ademo sur Kratos ; le refrain de Bambina, celui de Bené, de Luz de luna ; des hooks qui n’apparaissent qu’une fois au cours du morceau : « Mu-mu-mula meilleure amie » dans Mira, par exemple ; des harmonies vocales hyper chiadées et bien sûr une maîtrise totale de l’autotune. C’est presque démoniaque. Ademoniaque, même ! Ça vous plaît les jeux de mots ? Bon… Celui qui vampirise le morceau en débarquant avec « Ma vie, ma vie… » sur À l’ammoniaque, c’est N.O.Sferatu. De rien ! Il n’y a pas un reuf meilleur que l’autre de toute façon, inutile de choisir.
Ils faisaient déjà du très sale sur l’album Dans la légende mais depuis l’été 2018 et les sorties d’À l’ammoniaque donc, de 91’s et d’Au DD, ils ont encore passé un cap. Level up ! Difficile de trouver de meilleure production, même à l’international à part peut-être le prochain disque de Sedona Sunrise ? C’est parti pour saupoudrer tout ça de synthés 80’s : l’outro de Kratos ressemble à l’intro de Forever Young d’Alphaville ; on imagine facilement les deux frères rimer sur l’instru d’un couplet de Balavoine. Sauver l’amour, par exemple. D’ailleurs, bien malin celui qui sera capable de faire la différence entre les paroles du refrain de Sauver l’amour : « Comment retrouver le goût de la vie ? Qui pourra remplacer le besoin par l’envie ? » et celles d’À l’ammoniaque : « Tout niquer, ma vie / L’histoire s’ra courte, à mon avis, comme la dernière phrase de ma vie ». Une version est peut-être plus hood que l’autre, disons, c’est tout.
En les examinant bien, et si on les juge exclusivement d’après des normes artistiques et intellectuelles, les morceaux produits par PNL dans leur studio semblent, quels que soient les défauts propres à chacun d’entre eux (fake, y a pas de défauts), plus durables et plus dignes d’être écoutés que tous ces monologues ridicules, indigents et conventionnellement « rap », pleins d’egos de petits coqs clichés qui paradent en bas des blocs. On en aura soupé de ce délire ! Depuis que les frères Andrieu (c’est leur nom) ont débarqué, le rap tel qu’on le connaissait est ringardisé. C’est triste… Quand on voit Akhenaton galérer à poser sur l’instru de DA lors d’un passage au Mouv’, on pense au vieux roi gaga de Ran errant dans la tempête sur des pentes herbeuses balayées par le vent. Photographie saisissante de l’ancien monde. Le pauvre Akhenaton, quand il ne vient pas s’humilier à la radio, se tape la honte en faisant des apparitions douteuses en vedette américaine pour colloques de chefs d’entreprise à Marseille… Il veut faire concurrence à JoeyStarr et son one man show où il récite un best of foireux de discours à l’Assemblée Nationale (de Victor Hugo à Simone Veil) ou quoi ? Les gens changent, qu’ils disent. Demain, c’était pas si loin.
Alors « au DD », ça veut dire quoi ? Au détail, bien sûr, la vente de drogue, etc. Mais aussi, au deuxième degré ? À la première écoute, quand je me suis vraiment penché sur le phénomène, c’est l’effet que ça m’a fait. Je me plaisais à faire semblant de croire que je regardais (oui, aujourd’hui, la musique se regarde sur YouTube) une parodie de groupe de rap. Il ne pouvait s’agir que d’une parodie de groupe de rap. Les Inconnus l’avaient bien fait version hard rock en créant les alter egos toulousains des Guns N’ Roses : Dousseur de vivre ; seulement, il y avait un monde entre le génial Axl Rose et Didier Bourdon… mais ça, les humoristes stars des années 80, désormais plus que ringards, ne l’expliquaient pas. PNL, c’est ça, en équilibre sur le fil tendu entre le grotesque et le sublime, entre le « four » de la cité et la tour Eiffel (où ils ont tourné leur dernier clip), en funambule. N.O.S qui fait des fucks face caméra sur une plage en Afrique du sud avant de partir en radeau pendant qu’Ademo chantonne « Je t’aime à la folie », il fallait oser ! Et puis ça n’a rien à voir avec les fucks de Kalash Criminel qui fait croire qu’il va sortir le 47AK s’il y a embrouille… Arrête, tu vas rien sortir du tout à part un refrain trap piqué à Migos. Chez PNL, c’est aussi un fuck au « système ». Ils ne jouent même pas aux rebelles et pourtant ils le sont beaucoup plus que n’importe quel rappeur signé sur une major. Eux « font du biff » en indépendant : « J’sors des mots de merde / Et tu m’payes, payes, payes, payes, payes ». Double ironie… Mieux encore, ils font semblant d’être là par accident : « J’connais pas ré mi sol, la zik j’m’en bats les couilles ». Eux, c’est plutôt : « Rivaldo, Denilson, 91, Essonne ». Peut-on les blâmer quand on se rappelle des « gri-gris » du milieu gauche du Bétis au milieu des années 2000 ? C’est sûr qu’en comparaison, la zik, c’est sympa, mais bon…
Tu parles ! Ce sont des scientifiques, comme disent Amin et Hugo. Les frères ont écouté Drake, trouvé ça cool mais se sont dit : « C’est pas assez pop en fait… » Alors en avant pour une flopée de mélodies hypnotiques et autres trouvailles géniales : le couplet de Naha, les premières mesures de celui d’Ademo sur Kratos ; le refrain de Bambina, celui de Bené, de Luz de luna ; des hooks qui n’apparaissent qu’une fois au cours du morceau : « Mu-mu-mula meilleure amie » dans Mira, par exemple ; des harmonies vocales hyper chiadées et bien sûr une maîtrise totale de l’autotune. C’est presque démoniaque. Ademoniaque, même ! Ça vous plaît les jeux de mots ? Bon… Celui qui vampirise le morceau en débarquant avec « Ma vie, ma vie… » sur À l’ammoniaque, c’est N.O.Sferatu. De rien ! Il n’y a pas un reuf meilleur que l’autre de toute façon, inutile de choisir.
Ils faisaient déjà du très sale sur l’album Dans la légende mais depuis l’été 2018 et les sorties d’À l’ammoniaque donc, de 91’s et d’Au DD, ils ont encore passé un cap. Level up ! Difficile de trouver de meilleure production, même à l’international à part peut-être le prochain disque de Sedona Sunrise ? C’est parti pour saupoudrer tout ça de synthés 80’s : l’outro de Kratos ressemble à l’intro de Forever Young d’Alphaville ; on imagine facilement les deux frères rimer sur l’instru d’un couplet de Balavoine. Sauver l’amour, par exemple. D’ailleurs, bien malin celui qui sera capable de faire la différence entre les paroles du refrain de Sauver l’amour : « Comment retrouver le goût de la vie ? Qui pourra remplacer le besoin par l’envie ? » et celles d’À l’ammoniaque : « Tout niquer, ma vie / L’histoire s’ra courte, à mon avis, comme la dernière phrase de ma vie ». Une version est peut-être plus hood que l’autre, disons, c’est tout.
En les examinant bien, et si on les juge exclusivement d’après des normes artistiques et intellectuelles, les morceaux produits par PNL dans leur studio semblent, quels que soient les défauts propres à chacun d’entre eux (fake, y a pas de défauts), plus durables et plus dignes d’être écoutés que tous ces monologues ridicules, indigents et conventionnellement « rap », pleins d’egos de petits coqs clichés qui paradent en bas des blocs. On en aura soupé de ce délire ! Depuis que les frères Andrieu (c’est leur nom) ont débarqué, le rap tel qu’on le connaissait est ringardisé. C’est triste… Quand on voit Akhenaton galérer à poser sur l’instru de DA lors d’un passage au Mouv’, on pense au vieux roi gaga de Ran errant dans la tempête sur des pentes herbeuses balayées par le vent. Photographie saisissante de l’ancien monde. Le pauvre Akhenaton, quand il ne vient pas s’humilier à la radio, se tape la honte en faisant des apparitions douteuses en vedette américaine pour colloques de chefs d’entreprise à Marseille… Il veut faire concurrence à JoeyStarr et son one man show où il récite un best of foireux de discours à l’Assemblée Nationale (de Victor Hugo à Simone Veil) ou quoi ? Les gens changent, qu’ils disent. Demain, c’était pas si loin.

« J’écoute pas leur rap et leurs putains d’mythos sur fond vert »
Pour le côté vrai gangsta, on a déjà les nasheeds des frères Clain qui rafalent de réalité toutes les absurderies du plus déter’ des pseudo-bloods. Il a l’air fin, à côté, The Game, avec son étoile sous l’oeil et ses 60 jours à l’ombre. Maigre résumé comme dirait Goldman dans 4 mots sur un piano. En Syrie, on s’habille peut-être pas en Philipp Plein (quoique, il existe bien une photo d’un combattant de l’E.I. en Jordan 11, swaggé sur le champ de bataille) mais quand on parle, c’est sérieux (voir Les Boussolés dans Adieu #1 pour (re)lire les paroles de Ma Vengeance, retranscrites dans nulle autre publication papier). PNL n’a tué personne – même si, pour les armes, il aurait peut-être suffi de demander au papa qui, dans les années 90, roulait en Toyota immatriculée au nom de Serge Dassault (un copain) – mais ça n’a pas empêché Ademo de faire 3 ans de prison pour trafic de stup’. Seulement, à la différence des autres rappeurs, il ne fait pas le malin avec son stup’. Jawad non plus ne trouvait pas ça glamour de dealer, il nous l’a assez dit. C’est juste la vie, leur vie, entre deux parties de FIFA. Ce quotidien, ils l’ont mis en images, en film d’1h10 : la tétralogie Naha, Onizuka, Bené et Jusqu’au dernier gramme. Le Parrain en moins factice.
Les « spécialistes » viennent nous dire que PNL ne vaut rien car les deux frères ne savent pas rapper et que seuls les beats sont à sauver. C’est curieux, ils ont pourtant percé avec Le monde ou rien grâce à un « type beat » – c’est-à-dire une prod’ « à la manière de » – en l’occurrence une instru proposée sur YouTube par un random sous le titre : The Weeknd / Bryson Tiller Type Beat. Rien d’extraordinaire… Le phénomène est curieux, on a affaire à des Elmyr des temps modernes : on peut trouver du Drake plus vrai que nature pour pas cher et faire des millions de vues pour encore moins cher. Ces fameux beats sont vendus entre $50 et $200, Desiigner – rappeur américain signé sur le label de Kanye West – en a par exemple dégoté un bien dégueulasse pour son tube Panda. Sacré retour sur investissement !
Ah… Toujours quelques « vrais fans de rap » pour qui il est impossible d’accepter les influences pop de PNL. On se coltinait déjà les rockeurs incapables d’apprécier un morceau de Rihanna, aveuglés par des arrangements manquant cruellement de guitare à leur (mauvais) goût, quand bien même la mélodie n’avait rien à envier à celles de leur groupe préféré ; maintenant, sous prétexte qu’Ademo n’a pas le flow de Nas, c’est nul et sans intérêt pour leurs oreilles de chiens rajoutées par Snapchat. Ils n’ont pas compris que PNL est rentré dans le délire du rap pour mieux s’en extraire. Les thèmes sont sensiblement les mêmes mais, musicalement, Ademo et N.O.S possèdent une oreille, justement, une sensibilité et une subtilité qui les rend irrésistibles. Le résultat semble tellement évident, facile, comme un corner three de Steph Curry. Injuste ! Forcément que les bas du front tordent le nez, ça sent trop bon. Ils sont comme le chien de Baudelaire à qui il ne faut jamais présenter des parfums délicats qui l’exaspèrent, mais des ordures soigneusement choisies…
C’est une évidence, Ademo et N.O.S possèdent une culture musicale qui en étonnerait plus d’un. Pour sortir des mélodies pareilles, bien sûr, il y a une part d’inné mais ils ont forcément étudié la question et l’ont assimilée comme personne. Je suis sûr qu’ils ont le bon goût de se réjouir des couplets de Justin Bieber sur Love Yourself (merci Ed Sheeran) en se disant que c’est le feu, de l’intro de Dream On d’Aerosmith (même si Eminem a déjà fait le coup du sample), de la façon dont Harry Styles a dead ça sur le refrain de Sign of the times ou qu’ils s’amusent du pastiche de The Weeknd par M. Pokora (Les Planètes). Mais ça, Patrick Cohen (et tous les autres) et son mépris déguisé en incompréhension qui conclut sa petite chronique à leur sujet sur France Inter par un « Ouais ouais ouais » moqueur ne l’a pas saisi. Normal, pour lui, ce sont des Arabes (« Sang corse mélangé bougnoule » dixit Ademo dans Au DD) donc des abrutis qui vendent et fument du shit, pas des artistes… Alors ? Alors autant ne pas donner d’interviews, à la Daft Punk. Ça se comprend, que rajouter d’intéressant à Get Lucky ou À l’ammoniaque ? Tout est déjà dit, composé, écrit et chanté.
Dans le studio, les deux frères se lèvent en même temps. Le mix continue de tourner alors qu’ils se dirigent vers la sortie. Voilà, ça y est, l’album est prêt. Le plus attendu de l’année… Les bus aux couleurs de l’album, pour la promo, avec leurs portraits en super-héros Marvel bleu et violet, logo QLF sur la poitrine, sillonnent déjà les rues. Ils ont posté ça sur Insta. Devant le Louvre, ça claque ! Ademo et N.O.S ont bien remplacé « vé-Her par JR » sauf qu’ils ne se doutaient pas en écrivant 91’s qu’il serait aussi question du JR qui gribouille des illusions pro-Illuminati à la con sur le parvis devant la pyramide. Le remplacement, ils voient ça en grand. La pression ? Bats les couilles.
« Ça va être une dinguerie, ce disque.
— T’as pas peur ?
— Cœur de ice, tu connais… Et toi, en stress ? »
La porte se referme derrière eux. Dans le studio, une dernière phrase s’échappe des enceintes, puis plus rien.
« J’ai le sourire jusqu’aux pecs / Sur la Mecque, mec. »
Pour le côté vrai gangsta, on a déjà les nasheeds des frères Clain qui rafalent de réalité toutes les absurderies du plus déter’ des pseudo-bloods. Il a l’air fin, à côté, The Game, avec son étoile sous l’oeil et ses 60 jours à l’ombre. Maigre résumé comme dirait Goldman dans 4 mots sur un piano. En Syrie, on s’habille peut-être pas en Philipp Plein (quoique, il existe bien une photo d’un combattant de l’E.I. en Jordan 11, swaggé sur le champ de bataille) mais quand on parle, c’est sérieux (voir Les Boussolés dans Adieu #1 pour (re)lire les paroles de Ma Vengeance, retranscrites dans nulle autre publication papier). PNL n’a tué personne – même si, pour les armes, il aurait peut-être suffi de demander au papa qui, dans les années 90, roulait en Toyota immatriculée au nom de Serge Dassault (un copain) – mais ça n’a pas empêché Ademo de faire 3 ans de prison pour trafic de stup’. Seulement, à la différence des autres rappeurs, il ne fait pas le malin avec son stup’. Jawad non plus ne trouvait pas ça glamour de dealer, il nous l’a assez dit. C’est juste la vie, leur vie, entre deux parties de FIFA. Ce quotidien, ils l’ont mis en images, en film d’1h10 : la tétralogie Naha, Onizuka, Bené et Jusqu’au dernier gramme. Le Parrain en moins factice.
Les « spécialistes » viennent nous dire que PNL ne vaut rien car les deux frères ne savent pas rapper et que seuls les beats sont à sauver. C’est curieux, ils ont pourtant percé avec Le monde ou rien grâce à un « type beat » – c’est-à-dire une prod’ « à la manière de » – en l’occurrence une instru proposée sur YouTube par un random sous le titre : The Weeknd / Bryson Tiller Type Beat. Rien d’extraordinaire… Le phénomène est curieux, on a affaire à des Elmyr des temps modernes : on peut trouver du Drake plus vrai que nature pour pas cher et faire des millions de vues pour encore moins cher. Ces fameux beats sont vendus entre $50 et $200, Desiigner – rappeur américain signé sur le label de Kanye West – en a par exemple dégoté un bien dégueulasse pour son tube Panda. Sacré retour sur investissement !
Ah… Toujours quelques « vrais fans de rap » pour qui il est impossible d’accepter les influences pop de PNL. On se coltinait déjà les rockeurs incapables d’apprécier un morceau de Rihanna, aveuglés par des arrangements manquant cruellement de guitare à leur (mauvais) goût, quand bien même la mélodie n’avait rien à envier à celles de leur groupe préféré ; maintenant, sous prétexte qu’Ademo n’a pas le flow de Nas, c’est nul et sans intérêt pour leurs oreilles de chiens rajoutées par Snapchat. Ils n’ont pas compris que PNL est rentré dans le délire du rap pour mieux s’en extraire. Les thèmes sont sensiblement les mêmes mais, musicalement, Ademo et N.O.S possèdent une oreille, justement, une sensibilité et une subtilité qui les rend irrésistibles. Le résultat semble tellement évident, facile, comme un corner three de Steph Curry. Injuste ! Forcément que les bas du front tordent le nez, ça sent trop bon. Ils sont comme le chien de Baudelaire à qui il ne faut jamais présenter des parfums délicats qui l’exaspèrent, mais des ordures soigneusement choisies…
C’est une évidence, Ademo et N.O.S possèdent une culture musicale qui en étonnerait plus d’un. Pour sortir des mélodies pareilles, bien sûr, il y a une part d’inné mais ils ont forcément étudié la question et l’ont assimilée comme personne. Je suis sûr qu’ils ont le bon goût de se réjouir des couplets de Justin Bieber sur Love Yourself (merci Ed Sheeran) en se disant que c’est le feu, de l’intro de Dream On d’Aerosmith (même si Eminem a déjà fait le coup du sample), de la façon dont Harry Styles a dead ça sur le refrain de Sign of the times ou qu’ils s’amusent du pastiche de The Weeknd par M. Pokora (Les Planètes). Mais ça, Patrick Cohen (et tous les autres) et son mépris déguisé en incompréhension qui conclut sa petite chronique à leur sujet sur France Inter par un « Ouais ouais ouais » moqueur ne l’a pas saisi. Normal, pour lui, ce sont des Arabes (« Sang corse mélangé bougnoule » dixit Ademo dans Au DD) donc des abrutis qui vendent et fument du shit, pas des artistes… Alors ? Alors autant ne pas donner d’interviews, à la Daft Punk. Ça se comprend, que rajouter d’intéressant à Get Lucky ou À l’ammoniaque ? Tout est déjà dit, composé, écrit et chanté.
Dans le studio, les deux frères se lèvent en même temps. Le mix continue de tourner alors qu’ils se dirigent vers la sortie. Voilà, ça y est, l’album est prêt. Le plus attendu de l’année… Les bus aux couleurs de l’album, pour la promo, avec leurs portraits en super-héros Marvel bleu et violet, logo QLF sur la poitrine, sillonnent déjà les rues. Ils ont posté ça sur Insta. Devant le Louvre, ça claque ! Ademo et N.O.S ont bien remplacé « vé-Her par JR » sauf qu’ils ne se doutaient pas en écrivant 91’s qu’il serait aussi question du JR qui gribouille des illusions pro-Illuminati à la con sur le parvis devant la pyramide. Le remplacement, ils voient ça en grand. La pression ? Bats les couilles.
« Ça va être une dinguerie, ce disque.
— T’as pas peur ?
— Cœur de ice, tu connais… Et toi, en stress ? »
La porte se referme derrière eux. Dans le studio, une dernière phrase s’échappe des enceintes, puis plus rien.
« J’ai le sourire jusqu’aux pecs / Sur la Mecque, mec. »
Julien Vesper